7 duos et solos pour alto et harpe
enregistré en mai 2016 par Victor Laugier au studio essais (Sonvs) , au CNSMD de Lyon
Joanna Ohlmann, harpe et Aurélie Métivier, alto
AVANT-PROPOS
Le titre de ce recueil composé de cinq duos et de deux solos, « Les Cornelis » se réfère au second prénom du fameux artiste hollandais, Maurits Cornelis Escher. Ces courtes pièces célèbrent l’œuvre de l’artiste et son univers : les objets impossibles, les espaces paradoxaux, la circularité et l’infini. Les duos et solos qui constituent Les Cornelis sont très indépendants : chaque pièce s’ouvre et se referme sur elle-même et l’ordre d’exécution importe peu. Il est tout à fait envisageable de ne jouer que certains duos ou solos ; Il est possible et même de bon aloi, de les disperser dans un programme de concert.
Dallage-miroir est un travail sur le mode de jeu « zingué », distorsion de la corde en vibration. Comme pour les dallages d’Escher, il y a un jeu de complémentarité et d’imbrication entre les deux instruments. Un effet de miroir peut être intuitivement entendu ; la pièce est en effet construite à partir d’une symétrie centrée sur la note si, où de part et d’autre, les intervalles sont égaux, engendrant ainsi l’ensemble du matériau harmonique.
Escaliers en cascade fait référence à la fois à Cascade ou mouvement perpétuel et aux escaliers de montée et descente de M. C. Escher. Musicalement, les escaliers sont représentés par des paires ou des trios de notes montantes ou descentes, marqués par un accent sur la note initiale et joués dans un tempo élevé. La cascade est caractérisée par un tempo plus large et un canon rythmique irrégulier entre les deux instruments.
Hyperbole-pavage, comme Dallage-miroir, travaille la complémentarité entre l’alto et la harpe, à la différence cette fois-ci que le mode de jeu mis en avant est le glissando (ou portamento). Les dallages hyperboliques d’Escher ont inspiré cette pièce. La fonction cosinus hyperbolique a servi de modèle à la structure où le centre (l’abscisse 0, donc ordonnée 1 pour la fonction) est le do, la note plus grave de l’alto.
Le blivet est un objet impossible, une étrange fourche à deux branches à sa base et trois à ses pointes. Cette pièce est conçue pour harpe seule et joue sur la confusion permanente entre le ternaire et le binaire due aux jeux d’accents, aux ajouts ou suppressions de notes et aux superpositions en décalage de deux arpèges de trois notes.
Les anneaux de Borromée sont un symbole héraldique choisi par les Borromeo, une famille italienne de la Renaissance. Ce symbole est composé de trois anneaux enchevêtrés dont la représentation en trois dimensions est impossible. La pièce, pour alto seul, est conçue autour de trois gestes : le pizzicato ordinaire, le pizzicato main gauche et le relâchement du doigté qui fait entendre la résonance d’une corde à vide. La combinaison très précise de ces trois gestes permet d’exécuter la pièce avec une grande vélocité.
Montée ou descente ? C’est en quelque sorte une transposition musicale de Relativité de M. C. Escher. Les modes de jeux engagés produisent des hauteurs très aléatoires et des sonorités assez homogènes entre les deux instruments. La superposition de voix (jusqu’à quatre) trouble considérablement la perception des trajectoires montantes et descendantes.
Une Guirlande Éternelle est inspirée par le sous-titre de l’ouvrage de Douglas Hofstadter : Gödel, Escher, Bach : Les Brins d'une Guirlande Éternelle. Musicalement, la guirlande est symbolisée par un arpège brisé composé de six notes. Cet arpège subit au long de la pièce des compressions et des dilatations temporelles, intervalliques et de tessitures, sans jamais pour autant perdre sa morphologie.
Les Cornelis sont naturellement dédiés à leurs commanditaires, l’altiste Emmanuel François et la harpiste Joanna Ohlmann ; ils profiteront à coup sûr de cette liberté formelle pour mettre en avant leur grande inventivité. Je les remercie grandement pour leur disponibilité et pour leur éclairage avisé sur les possibilités techniques de leur instrument respectif.